vendredi 2 janvier 2009

Des moeurs et des honneurs

Hier, la République honorait ses artistes, parmi les heureux futurs récipiendaires de la Légion d’Honneur, promotion du Nouvel An, on notera quelques noms assez peu contestables : John Galliano, le créateur britannique de la maison Dior, élevé au rang de Chevalier, la danseuse étoile Sylvie Guillem, Jean-Marie Gustave Le Clézio, fraîchement nobélisé, Isabelle Huppert… je ne sais pas pourquoi les choses se gâtent franchement au chapitre musique, Chevalier de la légion d’Honneur Laurent Petitgirard, comme compositeur officiel du régime disons que c’est assez cheap mais ça passe encore... mais alors Didier Barbelivien, sinon d’être l’ami intime du Président on ne voit guère l’once du début de la moindre raison de lui épingler la rosette au revers de la veste. Vous me direz que d’être l’ami des puissants est une raison suffisante en soi, et au fond vous n’aurez pas tort : 2009-1789, de ce point de vue-là, strictement rien de nouveau sous les ors de la République, jadis ceux de nos monarques.

Alors on se dit que les belles âmes auront eu beau jeu de ricaner de ce pauvre prince de Bourbon, Charles-Emmanuel de son petit nom, choqué, scandalisé, de l’exposition Jeff Koons qui remplit allègrement depuis quelques semaines les tiroirs caisses du château de Versailles. Scandale, pornographie, atteinte aux libertés fondamentales, rien moins que cela, selon ce descendant de Louis XIV qui s’est vu néanmoins débouté la semaine dernière par la justice française. L’exposition Jeff Koons se prolonge jusqu’à dimanche. La majorité présidentielle, par la voix de son nouvel expert es culture, du moins autodésigné comme tel, un certain Frédéric Lefebvre, soulignait « que ce procès pour entraves aux mœurs prêtait plutôt à sourire surtout au regard de ce qui se pratiquait à l’époque du Roi Soleil ». Bien vu, en effet. A quoi il faudrait ajouter néanmoins que favorites et souverains savaient, eux, lutiner - c’est une chose - mais assurément séparer le bon grain de l’ivraie, ceux qui avaient leurs faveurs avaient pour nom Lully, Gluck ou Rameau ; aujourd’hui la Republique honore Didier Barbelivien, ça ne coûte rien à personne, disons que c’est juste comique, tragique, ou pathétique, c’est selon…
(France Musique, 2 janvier 2009)

1 commentaire:

  1. les trois ensemble en fait ! les trois ensemble. De quoi faire se retourner dans sa tombe ce pauvre Louis XIV qui eût certainement apprécié l'effet Koons et botté le derrière de son descendant espagnol...

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