mercredi 24 décembre 2008

So... "unexciting" ?






Les critiques ont été particulièrement, sinon abusivement féroces, avec Jean-Christophe Spinosi (photo, D.R.) qui dirige ces jours-ci un Cosi fan tutte au Théâtre des Champs-Elysées, à Paris. « Geste boursouflé, narcissique, note par exemple Mehdi Mahdavi sur altamusica.com, de quoi satisfaire un public envoûté par l’énergie ébouriffante de cet agité de la baguette. » C’est là que débute sans doute la confusion des genres entre le commentaire musical et le bon mot. La palme revenant à Marie-Aude Roux. Dans les colonnes du Monde, notre consoeur pointe « une franche incompréhension de la syntaxe mozartienne. Mais reste à cette direction d’orchestre qui tient du paraphe, ajoute-t-elle, un je ne sais quoi d’érotiquement jubilatoire ».
"Erotiquement jubilatoire"… on voit bien l’effet que cela fait, mais voilà qui donnera du grain à moudre à Spinosi. « En France, déclare le chef dans Télérama, nous avons beaucoup de gens qui analysent à peine la musique, la pratiquent… un peu, et promulguent des avis définitifs sur l’esprit et le bon goût. Je rêverais de régler certains procès à la pointe de l’archet, dans des joutes de style ». Notez que cela a du panache.


Notez aussi que l’affaire n’est pas nouvelle. En 1967, lorsqu’il dirigea une série de représentations de La Flûte enchantée, au Met, Josef Krips se fit épingler par le Times, "ce fut une Flûte, notait le quotidien… « unexciting »" - pas très excitante, quoi… "Mais une Flûte enchantée excitante ?" , relève Krips dans ses Mémoires. "Je ne peux absolument pas l’imaginer… et pourtant, inutile de se battre à ce propos, il n’y a qu’à l’avaler".
Un dernier mot, enfin, à l’adresse des jeunes chefs. Il est signé du même Josef Krips. « Commencez avec Mozart ! Non pas parce que j’estime que c’est facile, mais au contraire, précisément parce que c’est difficile. Et puis dirigez pour pouvoir vivre ! Absorbez, appréciez, triez, lisez, attendez, vivez et écoutez ! Lancez-vous au pied levé, si c’est nécessaire, même sans répétition. Mais travaillez à fond, aussi, et n’ouvrez pas les bourgeons de votre talent avant qu’ils soient mûrs pour la floraison ».

(France Musique, 21 novembre 2008)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire